• Chapitre 4

    4.

     

    Chapitre 4

    [X]

    - Où suis-je?
    La tête lourde et l’esprit embrouillé, Elizia s’éveillait difficilement de son évanouissement.
    Il avait perdu connaissance pendant que le plaisir, provoqué par la voix mystérieuse, lui emprisonnait l’esprit et envahissait tout son corps, lui tétanisant les membres dans une redoutable étreinte qui l’avait obligé à jouir en plein milieu de hall, au vu et au su de tous les étudiants, sans qu’il ne puisse rien y faire!
    A ce souvenir, il rougit de honte et se mit à trembler de rage. Si jamais son honneur et sa réputation avaient été entachés par les lubies lubriques de celui à qui appartenait cette maudite voix…
    Vaguement conscient d’être allongé sur quelque chose de moelleux et de doux, il se redressa brusquement de surprise. Mais saisit d’un vertige, il retomba aussitôt sur les draps.
    Des draps?
    Réitérant son mouvement avec plus de lenteur cette fois, le jeune homme jeta un coup d’œil circulaire afin d’évaluer la situation.
    D’après ce qu’il voyait, il était allongé sur un immense lit à baldaquin. Les rideaux qui l‘entouraient, aussi blancs que les draps, étaient tirés, et cachaient à sa vue la pièce qu’il supposa être une chambre.
    A présent totalement assis, il s’adossa à la tête de lit en bois massif, repoussant derrière lui la masse impressionnante de coussins et d’oreillers disposée en éventail. Comment était-il parvenu jusqu‘ici? Impossible qu’il y soit parvenu tout seul. Quelqu’un donc l’y avait porté, mais qui? Et quand? Depuis combien de temps y était-il au juste?
    Usant de précautions pour ne pas se créer de nouveaux vertiges, Elizia se pencha en avant, écarta les rideaux et découvrit, incrédule que la pièce était déjà éclairée. Un pas lent après l’autre, il sortit du lit et s’approcha des immenses fenêtres pour y admirer les étoiles qui brillaient dans la nuit sombre, telles des diamants dans un écrin de velours noir. Puis, titubant légèrement sous l’éclat aveuglant des lumières, il entreprit de faire le tour de la chambre. Si la beauté du hall l’avait ébloui, force lui était d’avouer que la splendeur de cette chambre était bien plus époustouflante encore.
    Tout de blanc immaculé, les murs et les meubles réfléchissaient la lumière des bougies, les faisant miroiter en une multitude de points scintillants. L’or, le velours et la soie se mêlaient dans un ensemble parfait, créant un univers empli d’une telle sensualité qu’un frisson parcouru le jeune homme de la tête aux pieds. Des objets précieux et des tableaux de maîtres paraient chaque espace, même minuscule, embellissant la pièce sans la rendre étouffante. Un miracle de décoration qu’Elizia n’aurait pas cru possible dans une pièce aux dimensions si étendues, mais qui le plongea dans l‘admiration la plus complète. Il n’avait jamais rien vu d’aussi beau.
    Tout  à sa contemplation, le jeune baron sursauta lorsque deux petits coups discrets se firent entendre derrière la porte. Un bref « oui » lui échappa juste avant que la tête d’un homme passe par l’entrebâillement et qu’un sourire ravi naisse sur ses lèvres. Elizia reconnut immédiatement Friedrich, il n’avait pas oublié sa formidable chevelure rousse et ses incroyables yeux verts.
    - Elizia, bonsoir! Je me permets d’entrer, si cela ne vous dérange pas, bien sûr!
    Puis sans attendre de réponse, l’immense rouquin entra et referma la porte derrière lui.
    - J’espère que je ne vous dérange pas.
    - Pas du tout mon brave. Je viens tout juste de me réveiller. Prenez donc un siège.
    - Vous êtes bien aimable.
    Préférant toutefois rester debout, le comte parcouru la pièce d’un regard appréciateur. Puis plongeant son regard dans celui d‘Elizia, il éclata soudain d’un rire tonitruant.
    - Eh bien, eh bien, monsieur le baron! C’est un sacré beau spectacle que vous nous avez servi ce soir!
    Horriblement gêné, le concerné se détourna.
    - Savez-vous combien de temps je suis resté évanoui?
    - Mmmh, je dirais que vous êtes resté absent assez longtemps, peut-être une ou deux heures?
    - Bon sang…
    Friedrich rit de bon cœur.
    - Allons mon ami, ne vous en faites donc pas tant! Dans ma région, il y a un dicton qui dit « ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort »! Et j’en connais même un autre qui dit que « le ridicule ne… »
    - Comment avez-vous trouvé ma chambre?
    Les dictons de cet écossais ne l’intéressaient pas, ils l‘agaçaient même. Elizia appréciait le comte et sa bonhommie, certes, mais se faire rappeler les événements de manière si cavalière ne lui plaisait pas du tout.
    - Euh et bien, c’est que la mienne et la vôtre sont voisines!
    - Comment cela « voisines » ?
    - Elizia, voyons! Cet homme inconnu nous l’a pourtant expliqué : les étudiants de l’Académie Mondrose ont des chambres privées. Nous sommes actuellement dans l’aile est du château, où toutes les chambres des hommes se trouvent. Vous vous êtes réveillé dans l’une d’entre elles, et son nom est « Lumia ». C’est inscrit sur la porte. La mienne s’appelle « Lambris ».
    A présent que le comte lui rappelait toutes ces choses, Elizia réalisa à quel point ces détails lui étaient sortis de la tête. Toute ces histoires abracadabrantes à propos de magie et de voix sortie de nulle part lui avaient fait perdre de vue la raison de sa venue. Or il ne devait pas s’égarer. Florent comptait sur lui.
    S’il se trouvait ici aujourd’hui c’était pour faire partie de l’élite et être de ceux dont les postes les plus importants leur apportaient gloire et honneur, pas pour rêvasser ni se faire martyriser par un sadique invisible. Il fallait, dès à présent, qu’il se concentre à nouveau sur son objectif et qu‘il n‘en déroge pas : décrocher son diplôme et rejoindre son amour le plus vite possible étaient prioritaire. Tout le reste ne comptait pas.
    - Un sou pour vos pensées Elizia…
    Concentré sur ses objectifs personnels, le jeune homme en avait oublié jusqu’à la présence du comte.
    - Mes excuses. Je me demandais qui était le directeur de cette école. Jusqu’ici personne n’en a jamais entendu parler. C’est…intriguant.
    - Mmh oui. En effet, c’est très curieux.
    Prudent, Elizia avait préféré mentir. Il ne pouvait décemment pas révéler à qui que ce soit que la personne pour qui il éprouvait des sentiments était un homme!
    Il assumait certes sans complexes sa sexualité, mais il ne pouvait se permettre de générer un scandale dans une société qui ne tolérait que la bienséance et la normalité. Sa fierté et son amour pour Florent lui interdisaient de commettre une telle erreur, car il savait parfaitement que cette différence ne serait pas comprise. Ils seraient jugés, traités en paria, et mis au banc de la société comme de vulgaires criminels, sans que rien ne garantisse toutefois qu’ils parviennent à rester unis devant la force de l’intolérance commune qui s‘abattrait sur eux.

    ***

    Chapitre 4

     

    - Friedrich, Elizia! Joignez-vous donc à nous!
    Le signal du dîner ayant été annoncé par un doux tintement de clochette venu de nulle part, es deux jeunes hommes étaient descendus ensemble dans la salle de banquet pour se restaurer.
    Elizia n’avait pas encore eu le temps de réfléchir correctement à ce qui lui était arrivé.
    Entre les étranges événements du train, la visite du domaine, les multiples interventions de la voix et son évanouissement, le jeune baron n’avait pas réalisé qu’autant de temps avait passé. Il n’avait rien avalé depuis son dernier repas au manoir, et par conséquent, il mourait de faim.
    S’attablant aux côtés de Célestina et d’Olivia, il s’étonna de la longueur surnaturelle de la table de banquet, admira la profusion et la diversité des plats servis et approuva les livrées argent et macassar des domestiques.
    Olivia, émerveillée par tant de beauté, s’exclama les yeux brillants et le sourire aux lèvres :
    - C’est incroyable toute cette richesse! On croirait rêver!
    - Je suis du même avis que vous ma chère!
    Bien sûr, Célestina n’avait pu s’empêcher de donner son avis.
    Amusé, Elizia sourit. C’était un trait de son caractère qu’il commençait à connaitre et à apprécier.
    Au fur et à mesure qu’il dévorait les mets qui s’entassaient dans son assiette, le jeune homme réalisa que tout, dans la salle était couvert d’argent et de velours pourpre. Du sol carrelé au plafond peint, des incrustations d’argent et de rubis brillaient de mille feux dans les moindres recoins de la pièce. La table en bois travaillé et les chaises couvertes de velours pourpre surpiqué de clous argentés occupaient la majeure partie de la pièce.
    Tout en dépeçant soigneusement une cuisse de poulet rôti à la broche, Elizia dirigea ses regards vers le haut de la table afin de voir qui l’occupait, et il dut presque se tordre le cou pour parvenir à distinguer non sans mal – étant donné qu’il était assis vers le milieu de la table et que ses camarades, comme les domestiques, ne cessaient de se pencher pour manger ou servir -, les visages de plusieurs hommes assis le dos droit et qui n’avaient pas touché au contenu de leurs assiettes.
    Leurs mines austères et renfrognées ne lui indiquèrent d’abord pas grand-chose. Mais en voyant l‘âge certain que quelques-uns arboraient, Elizia comprit aisément que ces personnes étaient ses professeurs.

    ***

    Ils étaient neuf. Un nombre impair.
    Pour des yeux ordinaires, l’apparence de ces professeurs - engagés pour enseigner les disciplines essentielles à connaitre pour diriger un pays - n’avait rien d’exceptionnel - ils ressemblaient à de vieux messieurs grincheux tout au plus. Mais pour d’autres regards plus exercés, ce que les nouveaux étudiants de l’Académie Mondrose ignoraient et ne pouvaient voir, devenait évident et flagrant : ces neuf êtres n’avaient rien d’humain.
    Tapis dans des corps qui n’étaient pas les leurs et camouflant soigneusement leurs capacités aussi surnaturelles que surhumaines sous des attributs humains superficiels, les représentants masculins attendaient patiemment le signal de leur maitre.

    « Chapitre 3Chapitre 5 »

  • Commentaires

    1
    HaruMeuh
    Mardi 7 Avril 2015 à 18:24

    Oui, oui, oui on va devoir ce contenter de ça et attendre la suite !!
    Je rêve hein xD
    Favorises tes autres DEVOIRS avant de continuer cette histoire mais... fais le VITE hein xD
    Enfin, je ne te met pas du tout la pression, je suis très mal placée pour faire ce genre de chose. Langue
    Enfin, je saurais être patiente ^_^

    2
    cicipouce
    Mardi 7 Avril 2015 à 18:25

    ça nous apprend un peu plus sur l'école c'est intéressant !!! Sourire
    j'attendrais patiemment la suite Sourire

    3
    minami
    Mardi 7 Avril 2015 à 18:25

    Coucou , ton histoire est super ! J'ai beaucoup de plaisir à la lire . Continue tu es une romancière extra ^^Bon

    4
    laliepetiteangel
    Mardi 7 Avril 2015 à 18:26

    toujours aussi intéréssant ^^

    5
    Lillycp
    Mardi 7 Avril 2015 à 18:26

    Ton style est toujours autant agréable à lire, fluide et sans faute et toujours cette petite musique de fond. Bon, j'espère qu'il ne va pas passer son temps à punir leurs élèves de la sorte ! Mais la suite a l'air de réserver quelques bonnes surprises! Hum, qual genre de potentiel?

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :